Unorthodox (Netflix) : une fascinante histoire d’émancipation

Article écrit par Mathilde Dandeu.

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À l’occasion de la semaine dédiée au Festival de Berlin, l’animateur Kevin Elarbi a reçu Anna Winger, l’une des créatrices de la minisérie allemande Unorthodox, disponible sur Netflix. Une série inspirée d’une histoire vraie, celle de Deborah Feldam, qu’elle a elle-même révélée dans un récit autobiographique «Unorthodox : the scandales rejection of my Hassidic roots», sorti en 2012 aux États-Unis.

Amies dans la vie, Deborah Feldam, lance l’idée à Anna Winger d’en faire une série. La scénariste touchée par l’histoire accepte le challenge, mais à condition d’être libre dans l’oeuvre originale. Une oeuvre très personnelle, dans laquelle Anna Winger confie à Kevin Elarbi qu’elle a eu l’autorisation de modifier quelques passages pour mieux l’adapter à l’écran.

Quatre épisodes de 50 min, qui embarquent les spectateurs dans une course folle. Unorthodox suit les pas d’Esther Shapiro (Shira Haas), une jeune femme issue de la communauté hassidique de Brooklyn. Esther Shapiro est en quête de sa propre identité et tente de trouver sa place dans cette communauté juive ultra-orthodoxe à laquelle elle fait partie. Une religion qui lui impose son époux Yakov Shapiro (Amit Rahav). Un mariage forcé qui va vite devenir un enfer, avec une belle-famille qui lui reproche de manquer à son seul devoir : enfanter. Si au début, elle pensait se complaire dans cette vie, elle va vite se sentir oppressée et étrangère à cet entourage.

Dans le plus grand des silences, Esther Shapiro ou ‘Esty’, décide de s’enfuir pour Berlin. Une ville dans laquelle elle découvre la liberté d’être une femme. Elle apprend à se connaître, se laisse tenter par les joies que la vie a à lui offrir. Passionnée par la musique, elle peut enfin se donner à cet art qui n’est pas ici interdit aux femmes. Une passion qui l’amène sur le chemin d’une nouvelle famille de coeur. Ils sont tous différents et pourtant elle se sent proche d’eux. « Quelqu’un peut être différent de toi, avoir une autre couleur de peau, une autre manière de se coiffer, alors que pourtant, il pourrait être plus familier que ce que tu penserais et ça, c’est le message de la série et c’est pour ça que je pense que la série parle à autant de gens dans le monde », confie Anna Winger.

Une liberté malheureusement de courte durée, quand son mari part à sa recherche accompagné de l’un de ses cousins Moishe Lefkovitch (Jeff Wilbusch). « Unorthodox » ne laisse pas de temps de répit tant par le suspens qui en découle, que par les références données autour de la  culture juive. Si la série est accessible à tout le monde, elle demande tout de même un petit effort de recherches si l’on veut aller plus loin dans ces détails relatifs à l’éducation orthodoxe. Anna Winger souligne d’ailleurs que «  l’une des choses les plus recherchées sur Google après la diffusion de la série était les zones orthodoxes dans le monde ». Unorthodox est bien plus qu’une série, mais un ancrage dans cette culture, avec notamment l’importance de la langue yiddish qui est parlée une grande partie de la série et non doublée.

Un langage primordial pour l’auteure, qui veut montrer comment ils utilisent cette langue et comment cette communauté perçoit le monde à travers ce dialecte. La scénariste a pu travailler avec des traducteurs pour en apprendre plus sur cette religion et être au plus proche de la réalité par le biais de ses personnages.

La comédienne Shira Haas, qui figurait parmi 60 actrices pour décrocher le rôle, a su se démarquer par sa beauté, son intelligence et sa force que l’on perçoit dans la série. Elle incarne avec naturel Esty, lui offrant une vérité et une authenticité singulières. Anna Winger se souvient de son audition :  « Elle nous a chanté une chanson de Léonard Cohen, la chanson « Hallelujah » et c’était vraiment incroyable, on était tous très émus, on ne pouvait pas en croire nos yeux et nos oreilles ». Une séquence d’émotion qui fait écho à l’une des scènes d’Esther Shapiro lors de son épreuve pour tenter sa chance dans l’une des plus grandes écoles de musique.

Le spectateur est de suite saisi par Esther Shapiro, un personnage à la fois complexe qui ne connaît rien à la vie et à la fois touchante. On peut également souligner le duo qu’elle forme avec Yakov Shapiro son mari. Ensemble, ils donnent le rythme tout au long de cette minisérie. Une dynamique poussée par l’histoire de cet amour non voulu, mais aussi par le jeu des acteurs. On sent entre eux cette alchimie, cette sincérité qui permet de croire à cette relation exigée par leur famille respective. Les deux amants essaient tant bien que mal de faire naître cette flamme, qu’Esther Chapiro préfère fuir. Des personnages justes de par l’enracinement des acteurs à cette culture juive, voire même orthodoxe comme Jeff Wilbusch. Anna Winger explique que le comédien a été élevé dans cette communauté et que le yiddish est sa langue maternelle.  « C’est un aspect important pour notre projet, car il connaissait beaucoup sur la culture et sur le langage ».  

Unorthodox, une série contemporaine, axée sur la remise en question de l’humain dans laquelle beaucoup de gens peuvent s’identifier.

Anna Winger est également l’auteur de la série « Deutschland 86 » et  « Deutschland 86 ». Un autre succès, qui transporte cette fois-ci le public dans un univers historique. Deux séries aux personnages opposés dans le temps, mais Anna Winger nous explique que son processus d’écriture reste le même. Le troisième opus, Deutschland 89, est diffusé à partir du 26 septembre en Allemagne et sera bientôt disponible sur Canal+.

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BetaSeries